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Les Touaregs, des nomades qui s’adaptent à leur environnement

Qui sont les Touaregs ? Les Touaregs sont un peuple qui est établi dans les régions centrales et méridionales du Sahara. Ils ne se qualifient pas eux-mêmes de Touaregs mais se nomment les Kel Tamashaq c’est-à-dire « ceux qui parlent la langue Tamashaq« .

Historiquement, les Touaregs ne sont pas habitants d’un État en particulier mais évoluent dans un espace qui s’ étend de l’actuel Burkina Faso en passant par le Mali, le Niger, l’Algérie jusqu’à la Libye. Par conséquent, depuis les décolonisations, certains Touaregs se disent sahéliens, d’autres par assimilation voulue ou forcée se disent arabo-musulmans, cela dépendra où ils se « résident » (1).

Crédit photo : extrait du livre de Marcel BAUDIN (2)

Leur mode de vie est lié et organisé par la contrainte du milieu dans lequel ils vivent ce qui renvoie directement à la transformation de leurs habitudes en fonction de leur environnement.

Origine de la particularité vestimentaire des Touaregs

Le Sahara étant un milieu reconnu pour l’hostilité de son climat et la faiblesse des ressources environnementales, les Touaregs ont dû survivre en s’adaptant à la vie au désert et en se protégeant contre la chaleur, le soleil et les vents de sable, raison pour laquelle ils portent des vêtements qui couvrent l’ensemble de leur corps (y compris leur visage notamment en ce qui concerne les hommes). Autrement dit, les contraintes environnementales (la nature) ont eu un impact sur les habitudes culturelles, d’où le lien entre nature et culture (3). En effet, le port du voile sur la tête chez les hommes est tout d’abord fait pour des raisons climatiques avant qu’il ne devienne culturel. Les femmes, quant à elles, se couvrent tout le corps sauf le visage. Probablement parce qu’elles ne sortent généralement presque jamais de leurs tentes. Marcel BAUDIN (4) le confirme « (…) Les raisons de cette tradition sont que pour se protéger du soleil, l’expérience montre que la partie frontale du voile appelé «Takelmoust», les protège de l’intense luminosité du ciel et que le voile de visage masque la réverbération du sol ». Autrement dit, selon l’auteur, l’origine du Takelmoustest tout simplement de nature pragmatique. Par ailleurs, les vêtements de couleur sombre qui déteignent sur la peau ont valu aux Touaregs le surnom d’ »hommes bleus » (5).

Crédit photo : sources familiales.

Comment s’adaptent-ils au climat?

Les Touaregs ont réussi à se maintenir longtemps entre quatre zones au relief montagneux. Dans ces milieux arides, les pluies sont rares et irrégulières. Les températures s’aventurent vers les 50° C. Le vent accentue encore plus cette aridité. Le paysage se compose essentiellement de roches, de cailloux et de sable. Les cours d’eau ont souvent leur lit complètement sec ce qui fait que l’arrivée des pluies exceptionnelles provoque fréquemment des crues brutales et dangereuses. En ce qui concerne les saisons, les Touaregs, dont la vie est réglée par les conditions climatiques notamment par les pluies, ont coutume de diviser l’année en 4 saisons (Awelen (la saison chaude), Akassa (la saison des pluies), Gharatte (l’équivalent de la période de l’automne en Occident) et Tedjrest (la saison froide)) qui rendent compte du cycle annuel et de son rythme. Ils connaissent les signes annonciateurs des changements de saison.

Concernant le puisage de l’eau, les bergers font appel à la traction animale. Bien que tous les espaces navigables soient cultivés, les rendements restent faibles, car les sols sont pauvres. Cette organisation temporelle de l’espace est fondée sur une connaissance approfondie des caractéristiques saisonnières, de la végétation et ce, sur des distances considérables.

Crédit photo : Sources familiales. Campement Touareg.

Conditions de la transhumance:

Comme beaucoup le savent, l’une des caractéristiques de la culture touarègue est la transhumance c’est-à-dire le nomadisme qu’ils appellent Ihinane qui veut littéralement dire «déménagement». Les «déménagements» étaient fréquents notamment pendant les 3 mois de la saison pluvieuse parce que réapparaissent plusieurs marigots, d’oasis … qui apparaissent dans certains endroits de leur espace. L’on se demande souvent comment est prise une décision de «déménagement» chez les nomades Touaregs et comment ça se passe? Lors de mes enquêtes sur le terrain, j’ai rencontré des Touaregs ayant connu le nomadisme. Je l’ai moi-même vécu, si je puis m’exprimer ainsi, mais que quelques jours. En effet, selon les témoignages et ma propre petite expérience sur ce phénomène, l’idée de «déménagement» apparaît généralement lorsque le campement reçoit un invité appelé en Touareg «Amedjar», c’est lui qui informe le campement qu’il a vu sur son chemin ou qu’il a entendu parler de pluie tombée à un tel ou tel endroit et que probablement il y a de l’herbe qui pousse ou qui a déjà poussé à cet endroit. Une personne désignée dans le campement, en général un des bergers, ira vérifier la véracité de cette rumeur. Une fois que la personne s’est assurée de l’existence des herbes et que ceux-ci sont assez poussés, la personne «enquêtrice» doit alors s’assurer que certaines conditions sont réunies: la première est qu’il existe à cet endroit un marigot ou un cours d’eau, ensuite vérifier l’estimation de durée de vie de ce marigot (exemple: 1 semaine, 2 semaines etc.); ensuite, déterminer si le cours d’eau va tarir rapidement ou pas car déménager sans passer par ce que les Touaregs appellent «Asseneyesse», (qui veut littéralement dire Tester), est une perte de temps et d’énergie. Lors de ce processus de vérification, la condition sine qua non pour que le déménagement se passe bien est que le berger doit s’assurer qu’il y ait effectivement de l’herbe (pour les animaux). Si oui, cela voudrait dire que déjà ce n’est pas une première pluie. Ensuite, l’enjeu sera de s’assurer que l’herbe ait atteint un niveau «broutable» afin qu’il puisse non seulement mieux pousser mais également que les animaux puissent mieux se nourrir. Si toutes les conditions sont réunies pour déménager, ils vont alors commencer à mettre en œuvre la transhumance/nomadisme. Cette décision de déménagement peut être prise la veille de ce déménagement mais jamais le jour J pour deux raisons: la première est qu’il faut d’abord attendre le retour du berger qui n’est pas dans le campement la journée, la seconde raison est d’avoir le temps de s’assurer que le bétail est au complet. Chaque tente s’assure que ses animaux de transport (Dromadaire, âne, cheval) sont tous réunis. Une fois que c’est fait, on vérifie que les autres animaux le sont également (chèvres, bœufs etc..). Ensuite, la partie logistique: on défait et plie les tentes et leurs piliers. On les pose sur les animaux de transport inclus les tout-petits des animaux qui ne peuvent pas faire de longues distances. Quand ils arrivent au lieu prévu de destination, avant de tout déballer, ils doivent faire une dernière vérification: s’assurer que le terrain sur lequel ils doivent installer les tentes ne soit pas inondable. Un déménagement dure en général 3 à 4 heures de temps et se débute tôt le matin.

Crédit photo : Sources familiales. Jour de «déménagement» (transhumance).

Références

  • Marcel BAUDIN «Les hommes voilés et les femmes libres: les Touaregs», Histoire et perspectives méditerranéennes, 2008.
  • Philippe DESCOLA «Par delà Nature et Culture», Éditions Folio, 2015.
  • Entretien sur la transhumance dans le désert Tombouctien avec un Touareg qui préfère rester dans l’anonymat, Avril 2022.

(1) Le verbe nomadiser n’est pas employé ici car l’on assiste de plus en plus à une sédentarisation « forcée » ou voulue des Touaregs due à plusieurs facteurs dont l’insécurité dans la zone sahélo-saharienne entre autres.

(2) Marcel BAUDIN «Les hommes voilés et les femmes libres: Les Touaregs», Histoire et perspectives méditerranéennes, 2008.

(3) Voir les œuvres de l’anthropologue Philippe DESCOLA entre autres « Par delà Nature et Culture ».

(4) Marcel BAUDIN «Les hommes voilés et les femmes libres : les Touaregs» », Histoire et perspectives méditerranéennes, 2008.

(5) https://www.francetvinfo.fr/culture/arts-expos/touaregs-l-identite-des-hommes-bleus-au-musee-des-confluences_3357781.html

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